dimanche 2 décembre 2007

Le fil sous la neige, création pour 7 funambules et 3 musiciens. Antoine Rigot. 24 novembre 2007

Il y a en fait 8 funambules, 4 femmes et 4 hommes. Mais le 1er funambule, Antoine Rigot, n'est pas sur le fil. Il est sous le fil, et aussi au bout du fil - comme Ariane qui jadis guida Thésée hors du labyrinthe ?
Il y a 8 funambules, 3 couples qui se font, se défont, se refont, et une femme seule sur le fil - mère ou soeur ou muse ?
Il y a la magie des funambules dansant, sautant et voltigeant sur ces fils - anges, fées, oiseaux, dragons, Hermès aux pieds ailés ? amis de la lune et de la poésie non dénués d'humour, et jamais désincarnés : les fils vibrent, les souffles s'accélèrent, les corps chutent - les pieds, nus ou chaussés, s'agrippent au fil, glissent, crissent - les cheveux se défont, les escarpins, les escarpins, les escarpins...?
Il y a 8 funambules donc : 3 couples qui se font, se défont, se refont, et un dernier, séparé par le fil. Elle, mère ou soeur ou muse, qui, à l'occasion, perd un escarpin. Lui, ange déchu du fil, funambule cassé, resté au sol, mais tire le fil de l'histoire.
A la fin de l'histoire : la lumière sur le fil crée un reflet de fil sur le sol. Un autre fil sur lequel Lui, redevenu funambule, marche, cahin-caha, poussé par ses pieds nus à Elle.

dimanche 21 octobre 2007

Olari Elts dirige l'Orchestre de Bretagne - Ravel et Sibelius, 28 septembre 2007

Olari Elts est un chef d'orchestre magicien. Il transforme la musique en matière à modeler, à transformer. Elle est tour à tour air, feu, eau, forêt, et il la fait jaillir, fuser, éclabousser ou nous bercer. On dirait "Fantasia", et c'est drôle, et c'est spectaculaire !
Olari Elts est un chef d'orchestre qui donne à voir la musique : les changements de tons, de rythmes, de teintes deviennent changements d'époque et de paysages. Elle est là, dans ses bras, au bout de ses doigts, dans son corps qui suit le mouvement : incarnée.
Au programme il y avait Ravel, "Valses nobles et sentimentales" et "Concerto pour piano et orchestre en sol majeur" avec Claire-Marie le Guay au piano ; et Sibelius, "Symphonie n°7 en ut majeur op. 105" et "le retour de Lemminkaïnen".
Musique expressive, qui ouvre des images en soi, qui appelle des sensations, et qui, dirigée par Olari Elts, convoque tous les sens à la fête.

jeudi 6 septembre 2007

Concerts gratuits de l'orchestre de Bretagne, 28 - 29 - 30 août 2007 à Rennes

Début de saison en musique, en musiques. Musiques classiques (au pluriel s'il vous plaît) au pied des tours du Blosne. Il y avait les habitués de l'orchestre, et quelques habitants des tours dans le public : des femmes en foulard, des familles aux enfants bruyants, des noirs, des arabes, des pakis... certains sont venus les 3 soirs...
J'ai senti quelque chose comme de l'enchantement, comme si Lionel Bringuier maniait une baguette magique agissant aussi sur le public. Sur le public non averti : non averti des risques encourus à écouter Kodaly et Brahms, Beethoven et Mendelssohn, et même Escaich et Dusapin ! Des risques encourus à écouter la musique de l'autre, la musique classique. Des risques de se laisser enchanter, par la virtuosité des chefs et musiciens, certes, mais aussi par l'émotion véhiculée par la musique, par-dessus les obstacles linguistiques et les barrières culturelles... peut-être ai-je rêvé tout cela ?
C'étaient de beaux concerts, des concerts populaires comme on parle de bals populaires. Comme j'imagine les bals populaires, musette et flon-flon sur les bords de la Marne, quand je n'étais pas encore Française. C'étaient de beaux concerts ! Et, comme sur les bords de la Marne, nous avons chanté et dansé, bras dessus, bras dessous, sur "Pomp and Circumstance" d'Elgar à la fin du 1er concert...

mardi 3 juillet 2007

Persépolis, Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud

Le noir et blanc pour parler du passé, passé précieux comme une miniature persane, ponctué de volutes et jonché de fleurs de jasmin.
Le noir et blanc pour parler de guerre, de terreur, de dictature, de prison, d'injustice, du sort fait aux femmes mal voilées et condamnées.
Le noir et blanc des histoires qu'on raconte, de l'histoire que Marjane Satrapi raconte, de l'Histoire qu'elle se raconte, parce que raconter donne du sens ? donne du rythme, de la poésie, du champ. Noir et blanc. Magie du dessin qui recrée ce qui n'existe plus, mais qu'on se repasse, comme un film ; qui rappelle ceux qui n'existent plus, mais qui nous parlent encore ; qui réécrit ce qu'on s'était dit.

samedi 12 mai 2007

Mahaleo, Palais des sports de Mahamasina, vendredi 4 mai 2007

Démarrage difficile, longueurs, temps morts.
Et pourtant, chaque chanson connue du public accueillie par des cris, des bravos, chantée à l'unisson, rythmée, vécue, commentée...
Il y avait les parents, les ados, les enfants, les grands-parents, et ça a duré 8 heures... 8 heures qui m'ont laissée sans voix. Il y avait tout Tana. Il y avait tout Mada ? je ne sais pas...
J'ai chanté, j'ai crié, j'ai traduit : ça parlait d'amour, d'exode rural, d'émigration ; ça parlait d'amis ou d'amants séparés par les études à l'étranger ; ça parlait de la vie, qui est dure, de l'alcool qui console, de l'amour qui rêve tout haut une vie meilleure... ça parlait de la rue, de Lendrema le voyou, le bandit, la racaille, qui erre de son village à la capitale, de l'hôpital psy à la prison, Lendrema le voyou, le bandit, la racaille, le fils du peuple...

Retour en France.
Démarrage difficile, longueurs, temps morts.
Pas de danse avant longtemps, cet alcool qui me console.
Mais des voyous, des bandits, des racailles, dans les chansons, dans les journaux, dans les cités.
On parle d'amour, d'immigration ; on parle d'amis ou de parents séparés par un retour au pays d'origine ; on parle de la vie, qui est dure; de l'alcool dont l'abus tue... on parle de la rue peuplée de fils du peuple... de fils du peuple...

lundi 2 avril 2007

Battuta, Théâtre Equestre Zingaro, dimanche 1er avril 2007

Musique ! Et au galop !
La vie passe aussi vite, assurément. Quelques tours et puis s'en va ! mais quel panache...
Si tu veux vivre bien, fais danser ta monture. De la vie à la mort, à cheval, dans un train d'enfer, avec des cris et des youyous, de la fierté, de l'allure !
Musique ! Cuivres et cordes à un tempo plus rapide que le coeur. Pas de temps morts. Et quel panache !
Poésie et humour... à cheval toujours...
Et nous voici à cheval aussi, dans la ronde, et réveillant au bruit de notre galop, des rêves de chevauchées sauvages et fantastiques au milieu des Tziganes, des Apaches ou des Kazakhs...

jeudi 15 mars 2007

Terrain vague, Compagnie Käfig, décembre 2006

Je n'avais pas de blog à l'époque où j'ai vu ce spectacle, mais l'émerveillement ressenti est intact. Je n'étais pas au spectacle d'ailleurs, j'étais... au terrain vague, la nuit, quand tout est possible, quand il n'y a plus ni poids ni gravité, quand les hommes volent sans vent et flottent sans bouées, quand les bras s'allongent, quand la lune veille... Poésie, euphorie, funambulisme au-dessus des toits - de banlieue, du faubourg - qu'on devine derrière les palissades , parenthèses urbaines, avant la folie immobilière, avant l'âge ingrat des adultes, avant la disparition des terrains vagues - vague à l'âme - lame de fond - fond d'la mer... - la la lère...
Plongeon en enfance où la réalité n'a pas moins de consistance et de texture que le rêve. Le rêve, c'est pour les adultes nostalgiques, le rêve c'est la fuite hors du temps et ses marteaux-piqueurs, le rêve c'est la porte claquée au nez de ceux qui mesurent les terrains vagues - vague à l'âme - lame de fond - fond d'la mer - mère Michel, et qui lui construisent une belle HLM avec accession aidée à la propriété payable en 40 petites annuitées... Adieu le terrain vague.

Allongés dans les herbes folles, on était invisibles. Derrière le foyer d'étudiants étrangers, les herbes ondulaient dans le vent : c'était la mer. A hauteur d'enfants allongés sur le ventre, c'était toute la mer, avec ses nuances de verts, ses vagues, ses vents, tour à tour rasants ou plongeants, c'était toute la mer qu'on traversait, invisibles voyageurs des mercredis, des samedis et des dimanches, odyssée tant de fois recommencée...
Allongés sur le dos dans ces mêmes herbes folles, c'étaient d'autres voyages qui se jouaient sur la toile du ciel, cinéma en plein air sous-titré par les avions qui arrivaient d'Orly, qui racontaient tout autour de la terre, et tout autour du ciel, les étoiles, les galaxies, les pays lointains à portée d'herbe folle, le pays des-cousins-des-cousines- des grands-pères-et-grands-mères accroché au fil des avions qui volaient en VO sous-titrée dans nos langues emmêlées...

Allongés dans les herbes folles, nous nous sommes enracinés, mais sans doute les avions ont-ils emporté quelques uns de nos rêves clandestins, car nous nous sommes aussi senti pousser des racines là-bas, à l'autre bout du fil déroulé jusqu'ici. Jaquiers ou tamariniers ici, peupliers ou châtaigniers là-bas, toujours un peu voyageurs, toujours en VO sous-titrés...

http://www.kafig.com/francais.htm

mardi 13 février 2007

May B, Maguy Marin, vendredi 9 février 2007

Je n'ai ni lu ni vu Beckett. Je me lance, toute seule, à la suite de cette cohorte de faces-crayeuses... C'est fou le nombre de personnes que j'ai peu à peu reconnues parmi elles.
Au départ il y avait 10 personnes : malades, fous, pauvres ? Etait-on dans un asile, dans une prison, un hôpital ? Pas ici en tout cas, pas dans la vraie vie. Ailleurs, dans un monde blafard et crayeux, plein d'autres, cabossés, aussi blafards et crayeux. Loin !
Au coup d'un sifflet, ils se sont rassemblés, et ont commencé à danser une mécanique incantatoire fascinante de précision : alors, les boîteux, bossu, obèse, cassé et autre esquinté claudiquant ne claudiquaient plus, ils dansaient, emportés par... par quoi ? par la musique ? par la force d'être ensemble, d'être semblables ? par les pulsions vitales qui débarquent en fanfare, réveillant sur leur passage des libidos très bon enfant ?
Ils dansaient : gestes parfaitement synchronisés, la foule comme un seul corps qui gomme les différences, les particularités, les handicaps, enchaînements répétés tout au long du spectacle, comme un rituel pour conjurer quel sort, quelle adversité, quelle altérité ?
Et puis il y a eu Schubert (quelle symphonie ?). Où la musique sort de la bande son en tenue d'hôpital, où les instruments de l'orchestre sortent de la fosse et se mettent en branle à pas glissés, où les mouvements se battent dans une envolée de craie. Schubert, et l'humain qui se débat dans ses propres limites devient lyrique. Suffirait-il d'un peu de musique ?
Et puis ils se sont changés, ils ont revêtu leur tenue de voyage, manteau-chapeau-valise aussi cabossée, eux-mêmes toujours aussi claudiquants et crayeux.
C'est là que je les ai reconnus : les éclopés croisés ici et chaque jour, qui font presque partie du paysage. Qui baladent dans la ville des sacs remplis de pain pour les pigeons, des sacs remplis de prospectus à distribuer au voisinage en échange de quelques mots, des sacs remplis de journaux pour s'isoler du sol la nuit quand il fait froid, des sourires à lancer aux enfants, à la volée ; puis j'ai reconnu mon beau-père André quand il marchait à tous petits pas voûtés vers une mort certaine ; et puis j'ai reconnu mon grand-père Charles quand, sous d'autres latitudes, lui aussi marchait à tout aussi petits pas chenus vers une mort toute aussi certaine. Et puis Elsa, et puis José, et puis Alice, et John, oncle ou amie, grand-mère et père... Ils ont tourné sur la scène, derrière la scène, et puis ont disparu un par un. Je ne les ai jamais revus.
Dans un autre de mes pays, les morts s'invitent dans les rêves des vivants pour que ceux-ci ne les oublient pas. Dans celui-ci de mes pays, ils apparaisent en filigrane derrière des danseurs maquillés, ombres à peine appuyées, refrains lancinants. Ils ne connaissent pas les frontières.

vendredi 9 février 2007

Cover, Rachid Ouramdane, jeudi 8 février 2007

Il s'agit du Brésil. Il s'agit de métissage.
Des hommes vont et viennent sur la scène, y posent ou prennent des objets : platine, baffle, ballon de foot, coupe (du monde ?)...
4 danseurs : 1 noir et 3 faux noirs, plutôt dorés que noirs d'ailleurs. Musique blanche : Sinatra, Rolling Stones, Joplin, the Smiths.
Pendant les solos, les autres danseurs continuent à aller et venir sur la scène, continuent à poser et reprendre les objets.
1er solo : un jeune contorsionniste nous montre l'étendue de sa souplesse. Drôles de sensations, aux frontières du malaise. Narcissisme, culte du beau, culte du corps ? Le corps, cet étranger... Elastique tendu et enroulé...
2ème solo : un homme en short et talons aiguilles, muscles saillants, brides détachées dont il se sert pour se mouvoir. Ou qui le meuvent, qui le régissent ? Pantomime. Auto-pantomime, puisqu'il est à la fois le marionnettiste et la marionnette. Le corps est d'homme. Les chaussures et la grâce de femme. L'équilibre est précaire : musique - talons aiguilles - brides. Ou brides - musique - talons aiguilles. Où est-il, où est-elle ? Hors du trio, hors du spectacle. Une fois déchaussé(e). Pieds nus.
3ème solo : le noir en transe. Puis le noir encagoulé. Le noir qui rit, qui crie, dans la même grimace. Sur "summertime" par Joplin. C'aurait pu être "strange fruit" par Holiday. Syncrétisme = métissage. Esclavage = métissage... mouais... C'est le seul danseur à ne pas être doré. Pas glamour d'être noir...
4ème solo : Ouramdane lui-même, doré en noir. "Bigmouth strikes again" des Smiths. C'est cet air qui m'est resté dans la tête d'ailleurs tout le reste de la soirée. Ouramdane donc danse, comme mon frère qui a oublié d'hériter du sens du rythme de nos aïeux. Ouramdane n'est pas brésilien, il n'a pas la samba dans le sang. D'ailleurs, ce n'est pas de la samba, mais du rock. Il s'applique. Il se soucie de son environnement. Il remet dans le vase la fleur que les autres danseurs n'arrêtent pas de sortir du vase. Puis reprend sa danse.
J'ai bien aimé que la musique s'arrête au moment précis où il voit la fleur parterre (toujours le même) et qu'il arrête de danser, et qu'elle recommence au moment où il recommence à danser. Ouramdane, le maître de la musique...
Voilà. Il me reste l'image de cet homme-chaussures, noir et doré, et les Smiths sur les lèvres.
L'impression bizarre de ne pas avoir tout vu, bien vu. D'être restée un peu en-deçà.
Le métissage, un carrefour. Mais je n'étais pas au bon...
Pour la partie noire-brésilienne, je préfère Carlinhos Brown.

vendredi 26 janvier 2007

Quatuor Psophos, Parlement de Bretagne, 27 janvier 2007

Je n'ai pas assisté au concert. Mais je suis entrée, une fois encore, dans le Parlement de Bretagne. Un lieu historique. Un lieu hors du temps. Un lieu ...

Des tapisseries se détacheront peut-être un jour les cavaliers qui amèneront la culture dans ma banlieue ? Un peu cet éblouissement, un peu de cette splendeur...

J'ai beau y entrer régulièrement, je ne me défais pas de l'impression de dissonnance entre ce lieu et moi.

J'ai beau y entrer régulièrement, ni l'éblouissement, ni la splendeur ne me suivent dans ma banlieue. Pas réussi à faire bouger les cavaliers sur la tenture...

Salia nï Seydou et Ars Nova, 26 janvier 2007

C'est la rencontre entre 2 mondes...
Rencontre improbable, difficile, douloureuse vu les visages souvent crispés des danseurs.
Rencontre entre des danseurs burkinabés et les musiciens de l'ensemble instrumental Ars Nova, ensemble de musique contemporaine.
Rencontre incongrue : entrée en scène de blancs et de noirs mélangés, dansant côte à côte ; mais les blancs n'ont pas le physique pour danser... Et quand les blancs se mettent à jouer, les noirs n'ont pas les gestes pour danser. Leur danse est hachée, transpire l'effort, la volonté de s'approprier cette musique qui ne vient pas naturellement à eux, en eux, qui semble forcer le passage.
Et quand elle passe ! Le duo violon-danseur : j'ai vu la musique se tortiller sur scène, onduler, ondoyer ; je l'ai vue incarnée, dans un corps noir qui plus est, plus foncé que le bois du violon. La musique faite corps, bras, jambes, muscles parfaitement dessinés, rictus de souffrance et sueur qui éclabousse la scène. La musique qui se donne à voir à moi qui ne l'avais pas entendue...

... ça m'a bouleversée.
Cette rencontre de l'autre qui ne va pas de soi.
Cette effort à comprendre, à entendre, à danser. La musique contemporaine ? Le patrimoine européen. Celui qui ne vient pas naturellement à moi, celui qui force le passage.

Pärt, Mozart et Beethoven, Orchestre de Bretagne, 21 janvier 2007 à Muzillac

Je ne connaissais aucune des oeuvres jouées ce soir-là :
Arvo Pärt "Cantus in memoriam Benjamin Britten", 1977,
Mozart "Symphonie concertante pour flûte, hautbois, cor et basson", 1778,
Beethoven "Symphonie n° 4 en si bémol majeur op. 60", 1807.

Le public était heureux d'être au concert, et sa joie communicative.
La musique ?
Grave Arvo Pärt.
Dansant Mozart.
Festif Beethoven.
Et l'impression d'être entrée dans le vestibule du patrimoine musical européen, sur la pointe des pieds, profitant de la fête...

samedi 20 janvier 2007

Gilles Jobin, Double Deux - 16 janvier 2007

12 danseurs, 6 femmes et 6 hommes. Et une musique électronique aux rythmes obsédants (Cristian Vogel). Des couples qui se font, se défont, se mélangent, sans que ça n’aille de soi, avec des heurts, des chocs, des coups – de pied, de gueule -, des gifles , des chutes. Avec de la provocation, de l’arrogance (de la tendresse à peine), du sexe acrobatique, théâtral, et sidérant de vérité. Et puis ce cri final, ce cri muet, ce cri qui n’en finit plus de durer, vers l’autre qu’on n’atteint jamais, qu’on poursuit, qu’on combat, qu’on malmène, qu’on remplace, et qu’on appelle, qu’on rappelle, encore et toujours ?

J’ai aimé ces duos abrupts, qui montrent le corps à corps, la négociation, la bataille entre l’un et l’autre, et entre l’individu et le couple. Juste l’espace de la scène : le même espace pour le face à face et le face aux autres, les autres qui n’ont jamais une trajectoire parallèle, les autres qui déboulent, qui s’immiscent, qui séparent. Pas d’île déserte où vivre le couple en autarcie.
J’ai aimé la frénésie, l’urgence, le rythme qui disent bien le tempo de la vie ici et aujourd’hui.
J’ai aimé le kama sutra, magnifique et jouissif, virtuose, qui semble dire que le sexe (l’amour ?) est un art martial, et les membres du couple des adversaires qui se doivent de maîtriser les règles du combat. L'esprit du combat. Vous avez dit kata sutra ?